L’empreinte carbone d’une chaussure : Part 2.2 comment aller plus loin ?

L'empreinte carbone d'une chaussure : Part 2.2 comment aller plus loin ? 1

Au programme : quelques idées pour avoir plus de gain sur l’empreinte carbone

Nous avons dans le précédent article comment à partir de l’analyse du cycle de vie, il était possible d’impacter l’empreinte carbone d’une chaussure. Essayons ici d’aller plus loin !

Le recyclage et la circularité

L'empreinte carbone d'une chaussure : Part 2.2 comment aller plus loin ? 2Commençons par un geste que nous pouvons tous faire pour limiter l’empreinte de nos chaussures en fin de vie : apportons les dans un site re-fashion ! Ce sont les bennes de collecte dont l’objectif est de réparer, réutiliser ou recycler les textiles et chaussures ! Environs 58% des collectes sont revendus en boutique de seconde main et 35% recyclés (8% sont incinérés) ! Cela permet de prolonger la vie du produit.

Le point le plus compliqué avec le recyclage est la séparation des différentes matières. Une chaussure de course contient généralement 3 à 4 matières différentes entre la tige et la semelle, pour pouvoir être recyclé chaque élément d’une chaussure doit donc être séparé. Cette opération, si elle n’est pas réfléchi en amont est très complexe voir infaisable : le collage laisse des résidus par exemple qui peuvent altérer les propriétés du plastique. C’est pourquoi aujourd’hui les chaussures dites recyclables tendent à être mono-matériau pour contourner cette difficulté (mais nécessite une plus grande réflexion dans le design). On reviendra sur ce point quand on discutera des exemples de certaines marques.

Le recyclage est une opération mécanique qui a donc un cout CO2, même si on comprend directement l’impact de la réutilisation du matériaux, le bilan global CO2 est nécessaire si l’opération est complexe. Il ne faudrait pas que l’opération entraine plus d’émissions 🙂

Futurecraft Loop empreinte carbone
Futurecraft Loop Gen 1 et Gen 2

Pour aller plus loin, dans le recyclage, il y a la circularité qui consiste à réinjecter le/les matériaux dans une nouvelle chaussure : la même mais en neuf. C’est une expérience qu’a déjà réaliser adidas avec la loop par exemple. Comme on peut le voir dans ce brevet, des actions mécaniques sont tout de même nécessaire. Il est donc nécessaire de faire l’étude d’un point de vue empreinte carbone de ces étapes.

Le Made in Local

On va lancer le débat : le made in France réduirait-il l’empreinte carbone d’une chaussure ? Oui et Non cela a besoin d’être réfléchi pour un vrai impact sur l’empreinte carbone.

Oui, car la France est un pays qui a une énergie fortement décarbonée comme on a pu le voir dans le premier article : un rapport 10 par rapport à la plupart des pays d’Asie du Sud-Est, mais ce n’est pas forcément le cas de tous les pays européens.

Non car cela ne réduira pas l’empreinte lié au transport/la distribution voir l’augmentera si ce n’est pas réfléchi. Si les matériaux ne sont pas produits au même endroit, elles feront plus de trajet et finalement le produit sera toujours distribué à l’international donc le trajet vers le site de vente sera identique (ou presque) : cette part restera donc en moyenne identique que le produit soit fait en France ou non. Le gain possible sur ce point du transport est le produire localement à l’échelle continentale sur l’ensemble de la chaine de production, ce qui implique d’implanter plus de sites de production mais de taille plus petite dans les pays ayant le plus bas mix électrique.

Pour essayer de mettre quelques chiffres sur l’impact du transport: (n’hésitez pas à me corriger)

  • Produire en local avec des matériaux locaux, à l’échelle de 2000km en transport par camion, d’après les chiffres de l’ADEME (0,08 kgCO2eq/km pour les camions vs 0,006kgCO2eq/km pour les bateaux) le gain est de moins de 1% environ sur le produit final  : 0,12kgCO2eq pour une chaussure vs 0,19kgCO2eq pour une chaussure amené 
  • Produire en local mais avec des matériaux produits en Asie : le gain est nul voir légèrement négatif si on suppose qu’il faut plus de matériaux et qu’il y a des déchets
  • Produire partiellement en local (ex: 50% de produit en Asie) : le gain est de 0,03kgCO2eq soit 0,2% du produit final et il est possible de le targuer « Made in France » en fonction de la valeur ajoutée française.
  • Produire en local, avec des matériaux produits en Asie et revendre le produit en Asie: le gain est  négatif. L’empreinte augmente de 0,06kgCO2eq

Changer les lignes

Mais tout cela ne réduit pas une chose qui a un effet important : la consommation et la « sur-production ». Un modèle a-t-il besoin d’un nouveau coloris tous les 6 mois ? A-t-on besoin de série spécifique/limitée/collector qui pousse à l’achat compulsif ? en d’autres termes : mettre fin aux collections saisonnières.
La production d’un nouveau produit ne serait alors motivé que part l’apport de nouveautés, d’améliorations. Ce modèle peut ressembler à ce qui se fait dans l’informatique où les mises à jour d’un produit sont faites en fonction des corrections de bugs, ou d’améliorations.

Une des limites des modèles de production actuelle est la prévision des ventes : 2 ans avant le lancement d’un produit, les marques lancent en fabrication les chaussures, ils commandent donc un certain volume dans l’espoir de les vendre. Ce chiffre est basé sur des études du marché mais ceci n’est pas une science exacte qui peut entraîner de la sur-production : trop de matière première, trop de stock produit, des déchets inutiles. Une solution serait la production à la demande : pas de stock de produits, voire pas de stock de matières premières : tout fait à la demande ! C’est possible dans le mode du fashion (je vous invite à écouter ce podcast sur SewSew You) et cela existe (en partie) dans d’autres industries mais il faut accepter cette période d’attente de la fabrication de votre produit, un peu comme pour votre voiture, ou votre maison. Ceci peut avoir ces limites sur le cout de « non utilisation » des machines si la demande est trop faible mais on sent qu’un modèle qui serait basé sur de la souscription peut être viable comme le fait Atreyu.

Conclusion

Créer un produit durable ne se limite pas à faire le même produit avec des matériaux durables. Pour aller vraiment plus loin, il faut intégrer cette exigence dès la conception de la chaussure pour la rendre recyclable par exemple et qu’elle est le moins d’impact possible. Mais les marques doivent aussi se poser de façon plus globale, quelle modèle aurait le moins d’impact : l’offre de chaussure à faible empreinte carbone est encore faible et difficile à discerner dans la panoplie des marques.

Dans un prochain article, on regardera quelques exemples concrets de réalisation autour de la course à pied.

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